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par Ann Alnatt
Il y a tout juste 90 ans, par un dimanche froid et pluvieux, naissait à Narbonne ce bébé qui deviendra, plus tard, notre Charles adoré.
Ce 18 mai 2003, il faisait également froid et pluvieux. A six heures du soir, il faisait déjà presque nuit et les rues, assez désertes, ressemblaient à un chromo du vieux Paris. Pourtant, dans une petite rue, à quelques pas de la rue de la Roquette, un peu de lumiere attirait les gens, sous leur parapluie, vers un théatre illuminé. Qu'allait-il se passer là ?
En entrant, des affiches de l' Association Charles Trenet nous apprennent que cet association a été fondé par le grand chanteur, lui-même, pour encourager et assister les jeunes qui, eux-mêmes, espèrent recueillir du succès dans ce métier.
J'ai pris mon billet puis monté l'escalier pour entrer dans la salle. Elle était toute petite, en forme d'amphithéâtre. Sur la scène, une toile de fond noire reproduisait l'auto-portrait du Fou Chantant, un piano, des micros, rien de plus !
L'assistance me semblait très amicale et beaucoup semblaient déjà se connaître. Moi qui étais étrangère, j'ai trouvé très gentil que certains d'entre eux bavardent avec moi.
Les lumières de la salle s'éteignent et, tout d'un coup, un homme bondit sur la scène. Grand, blond aux cheveux bouclés comme ceux de Charles et portant une veste couleur corail, il était exubérant et contrastait avec la toile noire du fond. C'est le directeur de l'association, M. Christian Lebon (un joli nom qui fait penser a un roi ou à un saint). Il explique que M. Georges El Assidi, qui aurait dû être présent, était malheureusement retenu à Narbonne. Il n'a pas introduit Mme Lucienne Trenet mais j'ai cru la reconnaître dans cette petite dame installée au premier rang. Christian Lebon explique ensuite la formule de cette soirée d'hommage : d'abord, en première partie, un concours entre six des jeunes chanteurs, dont nous serons invités à choisir notre préféré, ensuite, un récital des chansons de Charles, chantées par des artistes qu'il a connu.
Pendant l'entracte, plusieurs personnes de l'assistance ont très amicalement bavardé avec moi et m'ont demandé mon avis sur les concurrents. Le public couronna un jeune homme de Marseille, qui chanta une oeuvre personnelle, en s'accompagnant au piano. Un gagnant vraiment dans le moule de Charles.
Le deuxième partie, consacrée aux chansons de Charles, commenca avec un monsieur à l'aspect vraiment lugubre, que, paraît-il, Charles avait baptisé "le mou chantant" et dont la spécialité serait de chanter Y'a d'la joie ! Pour nous, cependant, il interpréta Revoir Paris. Imaginez, Paris, je venais de le revoir moi aussi, quelques heures plus tôt, et cela me mit les larmes aux yeux. Le deuxième artiste venait lui aussi de Marseille et il chanta Ménilmontant ainsi que La romance de Paris - pour laquelle nous fûmes invités à chanter avec lui.
Ensuite, un jeune homme et sa guitare nous livrèrent une version très personnelle de Boum !. Puis, une chanteuse "gospel" interprêta Que reste-t-il de nos amours ?, chanson qu'elle aurait déjà chantée devant Charles, lequel l'aurait félicitée. Enfin, rejointe par un chanteur, ils nous donnèrent un duo de La mer, à mon avis peu réussi.
La soirée s'acheva lorsque tous les artistes s'unirent au public pour un chorus endiablé de Y' a d'la joie. Je vous avoue qu'à la fin de la chanson, "mon coeur a prit des ailes" pour la première fois depuis très longtemps, tant cette évocation du grand Charles était puissante.
Le lendemain, le 19 mai, j'assistai à un nouvel hommage, à l'Opéra Comique, très jolie salle rococo et dorée, avec ses fauteuils en velours rouges. Une grande photo de Charles en chapeau, souriant comme toujours, décorait le fond de la scène. A droite : une table et quelques chaises. A gauche : un piano, une contre-basse et une batterie.
Il y avait beaucoup de monde. En effet, cette manifestation, mentionnée par Pariscope, avait attiré une grande foule de tous les âges, des jeunes enfants jusqu'à des personnes très agés. Aussi, plusieurs nationalités étaient représentées : un groupe d'italiens était assis derrière moi... qui suis moi-même de nationalité anglaise. J'ai assisté à la séance de 20 hrs. mais, le même jour, une matinée, organisée pour les enfants, à 14 hrs., avait, paraît-il, attiré 700 bambins !
L'animateur arrive sur scène, c'est Jacques Pessis, auteur d'un très beau livre sur Charles, L'âme d'un poète. Il nous accueille très aimablement et nous présente ses chanteurs, Mona Heftre et Michel Dussarat, ainsi que ses musiciens. Dans le même esprit que dans son livre, Jacques Pessis nous raconte la vie de Charles, depuis sa naissance jusqu'a ses adieux, tout en introduisant des chansons associées à chaque période. Ainsi Le petit pensionnaire rappelait la triste enfance de Charles, tandis que La porte du garage sa passion pour les belles voitures. Beaucoup de chansons pour illustrer cette conférence, une vingtaine environ, toutes très connues.
Jacques Pessis est un animateur très sympathique. Son plaisir, en écoutant ces chansons, qu'il apprécie visiblement beaucoup, était évident. Puis, quand nous, public, avons été invitée à chanter aussi, oui, j'ai ressenti cette même légéreté du coeur. La soirée s'est achevée, comme la précédente, avec un Y'a d'la joie interminable, que personne ne voulait conclure et qui nous a laissé croire que oui, il y en a encore de la joie, même si elle se cache de temps en temps.
Quelques jours plus tard, en flânant sur les bords de la Marne à la Varenne, je suis tombé sur un autre hommage, inattendu. Tout près de l'ancienne maison de Charles, face à l'Ile d'Amour, une petite statue toute neuve s'érige : une colonne de pierre est surmontée d'une petite sculpture en bronze de deux amoureux, très tendre. Sur un des cotés, une citation nous rappelle des vers connus : "Dans la petite gare, un sémaphore appelle ces gens, tous ces braves gens de la Varenne ..." tandis que sur l'autre coté, en bas, se trouve un petit chapeau en bronze.
Voilà encore quelques jours de nostalgie et de bonheur si vite passés à Paris, mais qui vont rester pour toujours au coeur de mes souvenirs...
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