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par Christian Radoux
Charles Trenet est mort. C'est difficile à réaliser. Il chantait - et enchantait - déjà bien avant ma naissance; j'avais fini par le croire immortel... Immortel, tout comme les petites merveilles que nous lui devons. C'était un vrai poète, un magicien des mots, des idées, des contes, des images. C'était aussi un musicien-né.
La fraîcheur, la diversité, le charme de ses mélodies en faisaient oublier, et c'est très bien ainsi, une science de l'harmonie, du contre-chant, de la modulation vraiment étonnante car il y était largement autodidacte. Le don, à l'état pur !
Ecoutez par exemple les premières mesures de "L'âme des poètes" Le début d'une gamme, à notes répétées. Sur le papier, on dirait un exercice de solfège pour débutants. Mais ça chante, ça chante !... Et un joyau comme "La jolie sardane". Deux minutes, quelques dizaines de mesures. Et, derrière la ravissante mélodie principale, six autres, dont le charme discret enivre le profane à son insu. Du grand art ! Comme ses dessins, ses peintures, dont on espère bien voir un jour ou l'autre une exposition. Mais quel musée conviendra ? Les cimaises devraient être des arbres dans un champ de fleurs.
Et puis ces touches pudiques de nostalgie, de tendresse, de sagesse en filigrane d'une imagination, d'une fantaisie toujours en éveil. Cette fantaisie dont Musset disait qu'elle est la forme la plus périlleuse du talent. Chez les grands créateurs, la légèreté est également une grande vertu : spontanément, ils fuient la lourdeur, pas la profondeur. Cela aussi c'est un don !
Alors, comme les canards du Jardin extraordinaire, je vous dis Thank you very much, Monsieur Trenet !
Les paroles de "L'âme des poètes"
Les paroles de "La jolie sardane"
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