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 LA TARENTELLE DE CARUSO
Paroles et Musique: Charles Trenet
© - 1966 - Raoul Breton

 A Venise, ville exquise,
J’arrivai pour le Carnaval
A l’auberge de la berge
Je laissai dormir mon cheval
Et fantasque comme un masque
Je courus droit au Corso
En chantant dans la bourrasque
Ce refrain de Caruso
Quand j’étais jeune en dettes
En dentelle en bonnet pétard
Je passais voir ma belle
A travers cheminées et placards

Dans la rue, la cohue
Une belle signorina
Me fit signe qu’elle est digne
D’entrer dans la danse avec moi
Je l’emporte à demi morte
Elle tombe dans mes bras
Mais sa mère en colère
Nous menace et crie là-bas
Ram’nez-moi donc ma fille
Cavalier chevalier du guet
Je suis vieille et sans famille
Je suis veuve et je suis fatiguée

La bonne vieille tout en larmes
Va se plaindre aux carabiniers
Elle explique à des gendarmes
Que sa fille est partie à pied
Mais hélas se sont des masques
En gendarmes déguisés
Sur le char de la tarasque
Ils ne pensent qu’à s’amuser
Ils l’entraînent dans leur ronde
Lui rabattent les jupes sur le nez
Ils lui disent qu’elle n’est pas blonde
Et font mine de l’assassiner

Une danse ça commence
On n’sait pas non quand ça finit
Une telle tarentelle
Peut durer la mi de la nuit
Surtout quand une poursuite
Se transforme en farandole
Et qu’il faut quitter de suite
Le Corso pour la gondole
Le Grand Canal en fête
Nous incite à nous esbaudir
A présent baissons la tête
Attention, c’est le Pont des Soupirs

La nuit passe on s’embrasse
On est seul sur un banc de parc
Ô merveille sans ta vieille
Je suis plus heureux que Saint Marc
Mais que dis-je quel prodige
Nous voilà vite cernés
Et des Doges nous délogent
En criant: Venez, venez!
Le bonheur est de tout âge
Mes amis nous vous invitons
Venez voir le beau mariage D’une vieille et d’un Pierrot fripon

Prends ma fille elle est gentille
Dit la vieille et regarde-moi
Je suis folle, je convole
Oui, j’épouse un masque de joie
Mais le ciel s’est fait tout rose
Je m’sens décontenancé
Je n’voulais pas tant de choses
Juste un p’tit peu m’amuser
J’embrasse la fille en larmes
Elle me dit je m’appelle Sido
Je serre la main des gendarmes
Bien le bonjour, je m’en vais au dodo

De Venise ville exquise
J’ai gardé le doux souvenir
D’une belle ribambelle
D’arlequins et de grands vizirs
D’un baiser de tourterelle
Dans la folie du Corso
Et aussi de la tarentelle
Que chantait le grand Caruso
Énorme et fantastique
Dans les noces et les banquets
Au dessert apoplectique
Et les pieds trempant dans les baquets

Quand j’étais jeune en dettes
En dentelle en bonnet-pétard
Je passais pour voir ma belle
A travers cheminées et placards.